Catherine Remmy

Catherine Remmy

Vit à Ingwiller (67) et travaille à la Basse Cour des Miracles à Strasbourg

Instagram : @remmycatherine

Cinq cents ans de réflexions
2024

On estime généralement qu’environ 300 000 paysans se soulevèrent. Réprimés par différentes armées de mercenaires levées par des ligues de la noblesse et du clergé, dont le duc de Lorraine et l’archiduc Ferdinand d’Autriche, plus de 100 000 de ces paysans furent torturés et tués. La plupart des autres furent bannis, réfugiés en forêt, réduits au brigandage. Martin Luther eut beaucoup de mal à se démarquer de ces révoltes qui revendiquaient une nouvelle éthique religieuse, parmi d’autres aspirations à des libertés élémentaires. Elles préfigurèrent la guerre de 30 ans.

La sculpture Cinq cents ans de réflexions est inspirée d’un dessin d’Albrecht Dürer, La guerre des paysans, projet dessiné en 1525, mais jamais réalisé. Une note ironique de Dürer accompagne le dessin : « Si quelqu’un veut dresser un monument de victoire parce qu’il a soumis les paysans rebelles, il pourra utiliser ce que je vais vous montrer ».
Autour d’un socle de briques en terre cuite, une plinthe de têtes animales (faïence et grès émaillée), compose la base agrémentée de quatre compositions florales (grès émaillé). Le fût de la colonne est constitué d’un assemblage d’éléments de la vie quotidienne paysanne : outils, vaisselle, d’un fagot de bois (grès au sel, faïence et grès émaillés) qui soutient un homme agenouillé (grès noir).
Cette sculpture dédiée au 500e anniversaire de la révolte du Bundschuh, n’évoque pas que les injustices de l’histoire régionale mais plus largement les soulèvements et les luttes qui méritent d’être invoqués sans relâche contre les pouvoirs qui nous asservissent, contre le saccage de la biodiversité, de notre rapport au vivant, à la nature et au sauvage. La forêt a été un lieu de repli des paysans de l’époque entre les révoltes et après. Nous protégera-t-elle des dérèglements du climat ou sera-t-elle emportée aussi ? Cinq cents ans de réflexions n’ont pas suffi apparemment. Nous souvenir pour nous soulever « vert ailleurs » ? 

Dans La nef des fous, écrit quelques années avant les révoltes et publié à l’occasion d’un carnaval de Bâle, l’auteur strasbourgeois Sébastien Brant brosse un tableau de la condition humaine, et par de nombreux aspects, toujours actuel. Il invoque la force du dessin :
« Nombreux sont les fous
Dont j’ai fait ici le portrait
Si quelqu’un dégaine l’écriture
Ou ne sait pas la lire,
Qu’il se regarde dans le dessin,
Il trouvera bien ce qu’il est. »

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